
Les mille roses d'une "Adoration" sans retour
"Il y a des accents durassiens dans cette Adoration qui évoque
notamment Le Ravissement de Lol V. Stein, dans la présence,
en creux, d'un monde tropical à la douceur trompeuse.
Ce mouvement, ce rythme, ont trouvé avec Nicole Dogué une
comédienne à leur mesure : elle habite, toujours sur le
point de vaciller sur les talons de ses escarpins noirs, ce monologue
calciné, écrit par un homme au nom d'une femme dévorée
par le manque de l'autre, pour en faire, simplement, un très beau
moment de théâtre."
Fabienne Darge. Le Monde. 11 janvier 2003
Le chant de la perte pour seule "Adoration"
"Ressac déchaîné. Haïtien installé
en France, où il s'est formé au théâtre, notamment
au Conservatoire supérieur d'art dramatique, Jean-René Lemoine
revendique le romantisme extrême de sa pièce «toujours
au bord du mélo», jusqu'au ringard et à certaines
formules si galvaudées qu'elles en deviendraient exotiques. Le
metteur en scène pousse l'audace jusqu'à insérer
du ressac déchaîné dans la bande son. La puissance
des comédiens, leur jeu impeccablement dirigé, en feraient
avaler bien d'autres. Nicole Dogué surtout.
Sa voix enveloppante, son corps d'amoureuse aux formes pleines. Digne
dans son délire, excessive telle l'Anna Magnani d'Amore et formidablement
délicate dans sa façon d'offrir à chaque mot l'écho
ciselé d'une première fois. Face à cette grande,
qui fut actrice chez Régy, Langhoff ou Alain Ollivier plus récemment
(les Nègres de Genet), le jeune Xavier Thiam endosse le mutisme
du faible avec une certaine élégance."
Maoea BOUTEILLET, Liberation, 9 janvier 2003
"On retrouve dans L'Adoration l'encre sombre de Jean-René
Lemoine, son goût d'une langue lente comme écoulement irrépressible
de lave. Une beauté précieuse et sauvage à la fois
qui s'enracine dans la langue des îles avec ses rugosités,
ses éblouissantes trouvailles, quelque chose d'archaïque et
sourd qui sonne comme paroles anciennes.
Nicole Dogué, interprète sensible, suit le phrasé
particulier qu'appelle L'Adoration. Troublante et vulnérable, elle
touche. A elle, d'ailleurs, la part essentielle. L'homme, ici, n'intervient
que peu. On aurait pu imaginer plus d'assurance, plus d'éclat du
personnage de Rodez, mais Xavier Thiam de par sa présence même
en donne une image plus douce, plus quotidienne qui traduit assez bien
l'égarement consenti de Chine."
Armelle Héliot. Le Figaro. 22 janvier 2003
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